La saison s’est ouverte le 28 mai à Montmagny dont l’histoire est fortement marquée par un grand citoyen, sir Étienne-Paschal Taché (1795-1865), premier ministre du Canada-Uni (1855-56 et 1864-65) et père de la Confédération. Il y a fait construire sa maison, bel exemple de résidence bourgeoise du XIXe siècle se distinguant par ses deux jolies tourelles d’angle. Aujourd’hui, propriété de la ville et musée ouvert au public, elle contient un bel ameublement ancien et plusieurs objets d’époque.
La bibliothèque municipale, logée dans l’ancien presbytère auquel on a accolé une aile contemporaine afin de répondre adéquatement aux besoins de la communauté, constitue un heureux mariage de l’ancien et du moderne; elle démontre une fois de plus l’opportunité de doter d’une nouvelle fonction un bâtiment d’autrefois.
Le manoir Couillard-Dupuis, construit au début de la colonie et reconstruit vers 1800, abrite maintenant le musée de l’accordéon. Les participants se sont initiés à ce patrimoine grâce à une remarquable collection largement documentée par le directeur lequel nous a même joué fort aimablement quelques airs.
Enfin, on a pu admirer l’extérieur et l’intérieur de la maison Bender, récipiendaire du prix Thérèse-Romer 2015.
Le 11 juin, Batiscan dont le nom en algonquin signifie ‘’brume légère’’ a été notre deuxième étape. Reconnu à juste titre comme un des Beaux villages du Québec, Batiscan nous a proposé non pas un mais deux presbytères témoins d’époques différentes de la paroisse. Le vieux presbytère dont la construction remonte à 1816 est inscrit au patrimoine du Québec; il présente une exposition permanente sur la vie quotidienne d’un curé de campagne et de sa ménagère au milieu du XIXe siècle. La construction du plus récent en 1867, comme celle de l’église actuelle, s’explique par le déplacement de l’activité économique du noyau village axée sur les scieries vers les rives de la rivière Batiscan.
Le fameux pont de fer construit en 1922 nous a menés au calvaire Lacoursière érigé sur sa terre par la famille du même nom en 1905. Le calvaire est constitué d’un édicule octogonal comprenant des arcs et des vitraux de même, naturellement, que la statue du Christ en croix entourée de celles de la Vierge et de Marie-Madeleine. Le calvaire a fait l’objet d’une restauration dans les années 1960 et il jouit d’un statut de protection puisqu’il a été cité par la Ville.
L’Office des signaux, immeuble fort bien conservé dont la mission analogue à celle d’un phare nous a rappelés les précautions prises autrefois pour guider les navires faisant face aux périls de la navigation fluviale. Enfin une grande maison magnifiquement restaurée nous a ouvert ses portes pour une visite détaillée. Et partout, une vue étonnamment belle sur le grand fleuve.
Le 16 juillet, c’était la deuxième fois en deux ans que l’APMAQ, à l’aimable invitation de la municipalité, se rendait à Saint-Esprit; il faut y voir un signe du grand intérêt qu’attachent au patrimoine ses citoyens et ses élus. Les premiers colons, en provenance surtout de Montréal et aussi dans une moindre mesure de Québec, s’installèrent dans la région peu de temps après la Conquête comme on nous l’a rappelé dans un exposé d’introduction.
Le programme de la journée comprenait plusieurs extérieurs et la visite de cinq intérieurs. Ce fut un petit voyage dans le temps puisqu’on a visité une maison dont la partie la plus ancienne remonte à 1808, celle-ci judicieusement agrandie au cours des dernières années, et également une autre appartenant au courant Arts and Craft construite en 1909. Entre les deux, on a admiré une maison d’inspiration Second-Empire contenant des peintures murales découvertes par les propriétaires en cours de restauration ainsi que de belles victoriennes de tendance Queen-Anne et néo Queen-Anne ces dernières témoignant de la prospérité locale. Enfin, une maison style Boomtown du début du XXe siècle, d’abord banque puis étude de notaire et maintenant exclusivement résidentielle tout en conservant sa chambre forte, a complété la visite.
Le dimanche 13 août l’APMAQ se rendait à Salaberry-de-Valleyfield. La visite axée sur la vocation industrielle de la ville a permis aux participants de se familiariser avec l’histoire de la Montreal Cotton Company laquelle a joué un rôle vital dans son développement pendant des décennies. Fondée en 1875 par A.F. Gault arrivé d’Écosse et J. Rosaire Thibodeau, l’entreprise est devenue rapidement un vaste complexe industriel dont il ne reste aujourd’hui que des vestiges.
Le musée de Société des Deux-Rives, ou MUSO, présente une excellente reconstitution du fonctionnement de l’usine, depuis l’arrivée du coton de l’étranger jusqu’au produit final en passant par les différentes phases du traitement. Les conditions de travail dangereuses et insalubres des ouvriers, les horaires, les salaires, la main d’œuvre infantile, sont évoquées. Même la mauvaise qualité de l’air et le bruit qui régnait dans l’usine durant la journée de douze heures sont reproduits avec réalisme.
La compagnie faisait venir des ouvriers spécialisés du Royaume-Uni et construisait à leur intention, dans le quartier dit anglais, des maisons qui existent toujours et que nous avons vues au cours d’un circuit pédestre. Il s’agit de maisons de briques en rangée (brick row) telles qu’on les construisait en Angleterre. Les ouvriers y vivaient à dix par unité. Aujourd’hui, ces maisons logent des familles qui, tout en les conservant, les ont adaptées aux besoins actuels et ont su leur donner un aspect des plus avenants. Une de ces maisons nous a aimablement ouvert ses portes.
Quant au quartier Nord il était, au temps de l’usine, habité par les ouvriers francophones non spécialisés et donc moins bien rémunérés que leurs collègues. Différents types de constructions s’y côtoient, boomtown, toit mansardé, Four Square et autres. Enfin une visite commentée du pont Jean-de-Lalande, pont à chevilles rotulées, menacé de disparition mais finalement sauvegardé et illuminé a conclu la journée.
Article tiré de La Lucarne, automne 2017 (vol. XXXVIII:4).
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