Une belle qui ne veut pas mourir : La maison de Zoé Casavant

Une belle qui ne veut pas mourir : La maison de Zoé Casavant

23 février 2021

Andrée Bossé

  

Amour, délice et orgue… La langue française, au pluriel, les décline au féminin. Saint-Hyacinthe, la famille Casavant, les grandes orgues et leur rayonnement international, tout nous rappelle cette entreprise prestigieuse. Au-dessus du portique d’origine, le chiffre « 83 » est buriné à l’acide sur le verre depuis près de 150 ans.

Mais qui est Zoé Casavant? Membre de cette grande famille, Zoé était la cousine germaine de Joseph, le père des deux frères, Joseph-Claver et Samuel, célèbres facteurs d’orgues à partir de 1879. Née en 1826, septième enfant de sa fratrie, elle perd sa mère à l’âge de 6 ans ; nous la retrouvons mariée en 1865 à Alexandre Desgranges, jeune veuf depuis 1861 et père de 3 enfants ; elle a 39 ans. Peut-être a-t-elle hérité de ce qui est maintenant le 900, avenue Sainte-Anne au centre-ville ou a-t-elle donné son avis lors de sa construction à une date qui demeure introuvable? Chose certaine, elle en a été la propriétaire jusqu’à son décès, le 1er janvier 1894. Son testament dicté devant notaire, le 27 décembre 1893, en atteste : elle lègue en usufruit la maison à son mari mais son légataire en propriété sera le fils de ce dernier, Alexandre fils. Alexandre père disparaît en 1897.

La maison passera à la famille Hallé au début des années 1900 puis sera acquise en 1936 par François-Xavier Demers qui la laissera en héritage à son fils Gérard-Marie Demers en 1958. Ce dernier épousera Reine Brunet qui lui survivra. En 2010, constatant qu’aucun de ses enfants n’est intéressé à s’y installer, elle se résout à s’en défaire. De par sa situation au centre-ville, la maison suscite beaucoup d’intérêt mais au prix d’une métamorphose totale et même, jusqu’à une démolition pour récupérer le précieux terrain. Or, madame Brunet Demers attendra jusqu’en 2017, à 81 ans, le jour où se présentera enfin un couple, Nataly et Sylvain, disposé à sauvegarder dans son intégralité la qualité de ce bijou immobilier et à lui redonner son éclat. Suivra une année de dur labeur avec l’aide d’amis, parfois à temps partiel, parfois à temps plein ; un artisan du lieu refera les plinthes et les moulures manquantes. Il a fallu arracher linoléums et tapis pour sabler les planchers d’antan, enlever les cloisons inutiles, réparer les plâtres, revoir les salles d’eau, tout en conservant minutieusement les éléments architecturaux d’origine. Dès 2018, pimpante, la belle recevra des bureaux au rez-de-chaussée et des locataires à l’étage de même qu’à l’arrière dans l’ancien garage transformé en logements par le beau-père de Reine en 1937. Nataly dira de la maison restaurée : « Le destin voulait qu’elle soit à nous ».

 

Dans la nuit du 4 au 5 août 2020, un terrible orage déferle sur toute la région maskoutaine ; la foudre perturbe le réseau électrique et des pannes de courant consécutives et rapprochées causent des courts-circuits qui embrasent la charpente du toit. La maison Casavant ne s`écroule pas mais elle est touchée au coeur… Il faut tout recommencer… Nataly en informe l’APMAQ qui juge que le récit d’un tel sinistre peut révéler à ses lecteurs les difficiles négociations avec une compagnie d’assurance, les interminables délais et les émotions personnelles à gérer.

Comme rien n’est aux normes actuelles de construction dans la maison et qu’on a noté la présence d’amiante dans les murs, la compagnie d’assurance n’a pas encore terminé l’inventaire des dégâts ; il en va, dit-elle, de la sécurité des ouvriers qui entreprendront les réparations. On estime, qu’à elle seule, la toiture de tôle devra être renouvelée (50 000 $). La charpente de bois du toit devra, elle, être reconstruite à l’ancienne. De plus, les colonnes du salon double, l’escalier central et les planchers ont été très endommagés par l’eau. Par contre, les pompiers ont travaillé avec soin ; ils ont déployé d’énormes bâches pour protéger certaines zones importantes et, de plus, ils ont évité de « défoncer » des portes et des murs lors de leurs interventions. En février 2021, rien n’a bougé… Dans un prochain numéro, nous vous mettrons au courant de l’avancement des travaux ! Zoé, Reine, Nataly, trois femmes fortes qui ont assuré la pérennité de la maison Casavant.


Article tiré de La Lucarne – Printemps 2021 (Vol XLII, numéro 2).

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