Allocution de Lucie K. Morisset lors de la remise du prix RLS 2021

Allocution de Lucie K. Morisset lors de la remise du prix RLS 2021

25 septembre 2021

Ce prix que je suis tellement fière de recevoir aujourd’hui a pour moi une signification toute particulière, parce qu’il y a bien longtemps que Robert-Lionel Séguin est dans ma tête. L’une des choses les plus touchantes, intellectuellement parlant – mais vous savez, l’intellect, c’est jamais très loin du cœur – l’une des choses les plus émouvantes que j’aie vues dans ma vie, ce sont les petits bâtiments, les sept petits bâtiments collectionnés par Robert-Lionel Séguin et aujourd’hui exposés dans la cour du musée de culture populaire de Trois-Rivières. Sept petits bâtiments qui témoignent peut-être de toute une civilisation, mais qui peut-être plus encore, pour moi en tout cas, qui plus encore révèlent l’importance que, comme témoins, ils ont pris dans l’histoire, dans notre histoire, et sur notre territoire. Dans la civilisation que nous partageons aujourd’hui.

En 1967, dans la première édition de cet ouvrage, La civilisation traditionnelle de l’habitant aux XVIIe et XVIIIe siècles, en 1967 – qui est aussi incidemment l’année de ma naissance – en 1967, donc, Robert-Lionel Séguin écrivait :

« On n’a pratiquement rien écrit sur l’Habitant, ce principal artisan de la Nouvelle-France. Pourquoi ce désintéressement, cette sorte de conspiration du silence à l’égard d’une figure dominante de la société canadienne-française. […] Les coutumes, les mœurs et les conditions économiques – je vais ajouter « et l’architecture » – de l’homme du terroir méritent sûrement un meilleur sort. ».

Sûrement, en effet, et moi je travaille sur la suite de cette histoire. Sur le XXe siècle – celui dans lequel Séguin collectionnait des petits bâtiments –, qui a appris à dire, dans l’architecture et dans le patrimoine, son appartenance. Je travaille sur l’héritage de la tradition, et sur la manière dont les matériaux et les formes vernaculaires du Canada français ont donné du sens, au XXe siècle, aux mots « habiter » et « identité ». J’ai une affection toute particulière pour cette architecture qu’on appelle souvent « régionaliste » et qu’on a si longtemps déconsidérée – comme Séguin l’écrit encore, « trop de travailleurs n’ont cherché que des sujets à panache. La valeur d’une œuvre historique s’estime pourtant à d’autres sources » – elle s’estime à la mémoire qu’elle porte, ajouterai-je.

Et je travaille sur l’acte d’appropriation de cette mémoire, par ceux qui la rendent vivante, par ceux qui la font patrimoine : ce sont eux que j’ai rencontrés et avec qui j’ai l’honneur de travailler, notamment, à Arvida. Qui est aussi une formidable ville planifiée – comme Bourlamaque qui a attiré cette année l’attention de l’APMAQ – et un site industriel d’une importance capitale dans l’histoire mondiale du XXe siècle. Mais qui est aussi, architecturalement parlant, une histoire d’apprendre à habiter. Une histoire architecturale d’appartenance.

Vous comprenez donc maintenant combien ce prix Robert-Lionel-Séguin et la reconnaissance de l’Association des propriétaires et amis des maisons anciennes du Québec sont significatifs pour moi.

Je voudrais donc remercier du fond du cœur la Ville de Saguenay et le conseiller municipal Carl Dufour, d’avoir constitué et soumis ma candidature à ce prix, et Olivier Bergeron-Martel et tous ceux qui ont travaillé fort sur mon « cas ». Je veux remercier aussi ceux qui m’ont honorée et qui m’ont encouragée, tout particulièrement Gaston Gagnon, Pierre Lahoud, Serge Viau, Gérard Beaudet… Et Luc Noppen, qui est aussi dans ma vie depuis bientôt trente ans.

Ma plus sincère gratitude va aux membres du jury du prix et, bien sûr, à vous, les membres de l’APMAQ. Merci, pour cette reconnaissance.


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