La restauration de la maison Hormidas-Lauriault (1905) implique une remise en valeur du parement en bois des façades et de ses composantes ornementales. Une précieuse photographie prise dans les années trente permet d’apprécier l’amalgame des décorations d’inspiration victorienne de la façade principale dans toute sa splendeur. Cette vision idyllique est devenue notre cadre de référence et guide nos actions. Elle montre que des rayons de soleil ornent le fronton triangulaire, au-dessus de l’imposte de la porte-lucarne. Ils sont camouflés, depuis 1983, sous une armature de plastique blanchâtre, qui imite la planche de clin d’origine. Toutefois, l’espoir de retrouver les rayons intacts s’évanouit lors des travaux de dépouillement de l’enveloppe de vinyle. Le constat est brutal, il ne reste plus que des vestiges épars du frontispice original. Cette perte dramatique d’authenticité s’explique par l’intervention d’un installateur, qui a systématiquement éliminé, à coup de ciseaux à bois, la plupart des parures en saillie sur les murs extérieurs. Une décision que les vendeurs de produits contemporains s’abstiennent de dévoiler à leurs clients, à savoir : le sacrifice méthodique des éléments significatifs d’un style architectural. Cette intervention expéditrice requise pour fixer des fourrures en bois d’épinette (1 x 3), à espacement régulier, disposées à la verticale comme base de clouage au nouveau revêtement de finition synthétique.
Devant le constat d’un vide ornemental, la décision est prise de reproduire les rayons de soleil. Ils se composent de lignes ou d’éléments linéaires matérialisant, sous forme symbolique, la lumière divine dans l’art religieux. D’autres personnes y reconnaissent la représentation des rayons de bois d’une roue de charrette, et même celle d’un rouet à filer la laine. Une étude attentive de la photo en notre possession ainsi qu’une recherche sur internet permettent d’approfondir nos connaissances sur cet élément rayonnant circonscrit dans un demi-cercle.
Grâce au relevé de l’empreinte laissée par les couches de peinture autour des rayons divergents, il a été possible de définir le contour primitif et de reporter les mensurations sur un gabarit. Les retailles d’une planche de cèdre servent à fabriquer les rayons aux bonnes dimensions. Les arêtes sont adoucies avec une lime à bois afin d’accentuer les détails d’ornementation. Finalement, une petite touche de raffinement est ajoutée en creusant une rainure concave au centre de la pièce de bois. Le parement d’origine du mur est patiemment décapé à l’aide d’un pistolet à chaleur. Un léger sablage précède l’étalement de plusieurs couches de teinture opaque pour minimiser la découpe autour des sept rayons. Ils sont ajustés individuellement à partir du point central, collés et vissés en place pour l’immortalité. La moulure courbe de l’encadrement a exigé quelques réparations ponctuelles. L’emploi de bouche-pore apporte l’illusion d’une seule pièce de bois, une fois le tout apprêté et peint.
Cette reconstitution des boiseries redonne une légitimité au fronton de la porte-lucarne. Un subtil accent de jaune a été ajouté dans la rainure pour accentuer l’effet de rayonnement. Toutefois, comme le résultat de cette initiative n’obtient pas l’unanimité au sein de la famille, il a fallu remonter dans un escabeau et retoucher les sillons d’un blanc chaud pour un accueil plus chaleureux. Un écueil facilement réversible par quelques coups de pinceau, contrairement à un varlopage des ornements architecturaux.
Article tiré de La Lucarne – Été 2019 (Vol XL, numéro 3).
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