Une corniche qui s’affiche - APMAQ (Amis et propriétaires de maisons anciennes du Québec)

Une corniche qui s’affiche

1 juin 2020

Pierre Bleau

Suite de l’article « Une corniche qui pleurniche » paru dans le numéro précédent de la Lucarne.

Avant de restaurer la corniche, il a fallu remplacer la toiture pour délimiter le débord du toit. Nous retenons donc les services d’un ferblantier couvreur de confiance. Il retire le profilé d’acier de couleur rouge des années 80 (et adieu aux bardeaux d’asphalte noir laissés en dessous), pour installer une tôle à joints pincés d’une teinte moins festive plus conforme au courant victorien de la maison. Le retrait de la vieille toiture laisse voir une saillie en piètre état. En effet, le couvreur de 1981 avait retiré les doucines et soufflé la planche de rive avec du bois traité pour ensuite recouvrir le tout d’une feuille d’aluminium blanc.

On assemble l’échaudage métallique pour s’élever du sol et aménager, à l’aide de madriers, une plate-forme au-dessus du versant de la toiture de la galerie. Le travail commence avec le renforcement de la charpenterie du caisson de l’avancée de toit. Ainsi, on double la base des chevrons pour ajouter un fond de clouage et recevoir de nouvelles planches (ill. 1).

La doucine originale (ill. 1a) a été fidèlement reproduite par un atelier d’ébénisterie de Montréal. La moulure ondoyante s’insère entre la nouvelle planche de rive et le larmier (partie saillante destinée à faire tomber l’eau de pluie en gouttes à distance). Le jeu entre le larmier (profilé d’acier) et la doucine est calfeutré à l’aide d’un filet de scellant adhésif hybride pour revêtement de la marque ADSEAL. Ce produit peut être peint et améliore la finition en obstruant les interstices entre deux pièces de bois. Il assure aussi par ses propriétés la cohésion entre les morceaux de bois.

Ensuite, on passe à l’étape de marquer les centres des consoles selon un espacement régulier de vingt-sept pouces (ill. 1). Elles sont fixées dans le forjet (planche horizontale en saillie de l’aplomb) avec deux vis à patio et à l’aide de clous galvanisés dans la planche du mur (ill. 2). Pour éviter le fendillement du bois, il faut percer des trous avec une mèche à bois avant de clouer les moulures. Étant de la vieille école, j’utilise toujours un marteau de menuisier et son fidèle compagnon le chasse-clou.

Une restauration oblige de mesurer chacune des moulures avant de les couper. Les gens de métier répètent aux apprentis : « mesurer deux fois, couper une fois ». En équilibre sur un madrier de l’échafaudage, un modeste serre-joints en bois sert de gabarit pour couper à 45 degrés la moulure (ill. 3). Il faut bloquer la moulure entre la mâchoire de la serre et le guide de coupe pour tailler la pièce à la longueur voulue. Je sais, c’est plus rapide avec une scie à onglet électrique et même une boîte à onglet. Par contre, je préfère toujours la scie à queue d’aronde et la sensation du sciage dans un matériau noble. Un geste de mémoire pour le travail des artisans. Le motif rectangulaire du panneau est composé d’une moulure de ¾ de pouce qui ceinture le médaillon (ill. 4). La répétition de tous ces éléments forment un riche bandeau ornemental dont s’entiche maintenant la maison.


Article tiré de La Lucarne – Été 2020 (Vol XLI, numéro 3).

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